LA PERCEPTION DU MAL. Chapt I.

Publié le par David de...

LA PERCEPTION DU MAL. Chapt I.

La journée est froide, humide et sale comme le ciel qui décore les fenêtres. La nuit pour moi était blanche: je n' ai pas dormi. Je suis resté seul avec mon verre et mes glaçons. Ma mémoire m'a torturé comme une hyène acharnée sur une dépouille.

J' avais envie de l' entendre. Je me précipite sur le téléphone, compose le numéro. J' entends sa voix douce et brûlante me dire "allo", A quoi je réponds:"C' est moi, Elisabeth". L'ambiance devient à présent, froide comme une banquise mais sa voix me crache son semblant de braise à travers le combiné: "Je viens ce soir mais pas maintenant. J' ai prévu autre chose en début de soirée. A plus tard. "
Je raccroche, un goût amer dans la bouche. Et un refrain, clin d'œil à "Mélodie Nelson" de Gainsbourg: :

Aimable petite conne,
Moi qui t' ai pris dans mes bras,
Je te briserai de mes doigts
Pour que tu ne sois à personne.

Je sens la fatigue me grignoter lentement la cervelle. Je me dirige vers la chambre et je m' affale sur le lit. Mais mes yeux refusent de se fermer. Je me redresse, agacé.
Mon désir pour elle est plus salace qu'amoureux, et aussi tenace qu'une envie de vomir. Comment pourrais-je dormir?
Je parcoure l' appartement dominé par cette obsession, à la recherche d'un artifice qui me ferait fuir la réalité.
Je stoppe devant le bar: je fixe la bouteille de vodka qui me nargue avec son collier de Themesta. Pareil à une scène érotique, je la caresse du bout des doigts la dévisse délicatement et m' empare de la boîte de cachets qui patientait tout près. Il en tombe deux dans le creux de ma main, je les jette dans ma bouche tandis que la bouteille suit machinalement.
Mes souvenirs commencent à flotter dans mon esprit tels des poissons morts à la surface de l' eau. Juste les plus mauvais remontent.
Je bois encore et encore. Mon esprit se met à clignoter comme un spot, comme on joue avec un interrupteur. Là, pas là. La marée était de plus en plus forte et montait.
Je tente de me diriger vers la chambre mais mes jambes refusent de me soutenir. Je m' effondre.
20H. On sonne. Je marche vers la porte en titubant
d' un mur à l' autre. Heureusement que je suis dans un couloir.
C' est Cassandra. Je l' appelle “Le cas Sandra". Je la fixe dans l' oeilleton sans lui ouvrir.
-Ouvre-moi. Je sais que tu es là.
Je la regarde s' enraciner derrière la porte et faire crier la sonnette à sa place. Elle gravite autour de moi depuis un an. En ellipse. Elle s' éloigne dés qu' elle a mieux à faire et se rapproche en saison morte.

Le temps fuyait et je n' entends déjà plus sa respiration saccadée. Je saisis machinalement la bouteille de bourbon. Je le sens lentement m' envahir les veines et la cervelle. Mon esprit vacille comme le souffle trouble la flamme d' une bougie. Mes jambes sont faibles. Je me dirige au salon, plus près et je m'effondre sur le sofa. Les vagues reviennent et au rythme des marées, de sombres images vont et viennent, qui me donnent la nausée. Je cours aux toilettes et j' embrasse la cuvette pendant un interminable quart d' heure. J' ai l' impression de m' être vidé de toute ma substance. Je regarde avec dégoût et regret le résultat de mon quart d' heure d' agonie.
J' ai besoin d' air avant de sombrer dans l' inconscience et peut être même des conneries. J' arrive à la porte. J' ouvre et tente de me précipiter vers l' ascenseur, dans l' obscurité.
Je trébuche et baisse les yeux:C' est Cassandra.
Elle est couchée devant ma porte. Vautrée sur ma paillasse comme une chienne allaitant ses petits.
Pourtant, la voyant ainsi, je lui cède encore.
Elle reste toujours maîtresse de mes émotions.
-Entre.
-Il y a quelqu'un d' autre, n' est ce pas? dit-elle en fixant mes yeux pour déceler le mensonge ou la vérité.
-Pourquoi t' aurais-je appelé s' il y avait quelqu'un d' autre?
Il y avait quelqu'un d' autre.
-Parce que tu m' aimes encore, dit-elle.
Je ne réponds rien, la laissant patauger dans ses doutes. Deux larmes de plomb préparées depuis si longtemps pèsent sur chaque œil et glissent sur ses joues roses. Ses mèches noires guident la goutte qui perle comme la rosée jusque sa bouche.
-Arrête. Arrête de te foutre de moi!Arrête! et je la gifle violemment. Elle vole contre le bureau et sa tempe heurte le coin bien saillant. Elle tombe sur le sol et reste immobile, inerte.
Mes lèvres remuent en prononçant son nom mais aucun son n'en sort. Je l' appelle encore une fois un peu plus inquiet:
-Cassandra?
Je m' approche redoutant le pire. Sa tempe a une teinte violacée, un léger saignement. . .
Je sens le souffle des vingt ans de taule me faire frémir l'échine. Je me penche près d' elle. J' approche ma main lentement, soulève ses cheveux qui masquaient sa bouche. Je les rabats derrière sa nuque en laissant glisser ma main sur son oreille.
-Cassandra?
Ma main glisse encore, de son cou jusque entre ses seins. Elle ne respirait plus.

Suite: LA PERCEPTION DU MAL. Chapt II.

David de...